Feuilles d’herbes #3 Septembre 2020

  • Recréer nos imaginaires, tisser la toile du soulèvement.
  • Qu’est-ce qu’un peuple ? Explorations par les marges

Idées pour retarder la fin du monde,
Ailton Krenak, ED. Dehors

Ailton Krenak fait parti du peuple des Krenak, un peuple autochtone du Brésil, vivant dans la vallée du Rio Doce. Dans ce court texte, il revient sur l’histoire de son peuple, depuis le XVIè siècle et l’invasion de leurs terres par les Européens, à l’empoisonnement récent d’une grande partie de leur habitat par des boues toxiques dues à l’extractivisme. Face à la crise anthropocène, et l’angoisse qu’elle provoque, il propose de puiser dans les stratégies de résistances et dans l’approche du monde que développe les peuples autochtones.
Recréer des liens avec la Terre et toutes les formes du vivant, au-delà d’une excellente façon de combattre le capitalisme et son développement mortifère, pourrait peut-être, sinon « retarder l’effondrement », du moins nous permettre de mieux l’envisager et s’y préparer !

Chroniques altermondialistes,
tisser la toile du soulèvement global
Starhawk, ed. Cambourakis

L’écoféminisme est un mot qui, fortement connoté, divise ou rassemble le mouvement féministe. Starhawk, figure de proue de l’écoféminisme nord-américain, en incarne le pendant spirituel et magique, dans des ouvrages tels que Rêver l’obscur. Mais, avant d’être une théoricienne sorcière, elle fut et est toujours une militante de terrain, active notamment dans le mouvement antimilitariste et antinucléaire. Dans Chroniques altermondialistes elle revient sur ses souvenirs de mobilisations (G8 de Gènes, Forum social de Porto Alegre, contre-sommet altermondialiste de Seattle, de Québec…) et démontre comment sa philosophie, aussi éthérée puisse-t-elle paraître à certain·es, s’adapte et prend sa source dans une réalité militante.
Un livre joyeux et fédérateur, pour recréer un imaginaire combatif et « tisser la toile du soulèvement global ».

Résister au désastre
Isabelle Stengers, Ed Wildproject

« Ce qui nous attend n’est pas un big flash, une fin du monde brutale et instantanée. Non, quoi qu’il arrive, ça va se déglinguer pendant des siècles. Alors ma question est : que peut-on fabriquer aujourd’hui qui puisse éventuellement être ressource pour ceux qui viennent ? »

Isabelle Stengers est philosophe des sciences et militante écoféministe de longue date. Dans ce court dialogue avec Marin Schaffner, elle trace des pistes pour penser notre temps et ses enjeux, à travers les sciences, la littérature de science-fiction, le féminisme et les luttes militantes contemporaines, le monde vivant et nos liens avec ce dernier… Avançant épaule contre épaule avec Donna Harraway, Bruno Latour, Vinciane Despret et bien d’autres, Isabelle Stengers décrit, comme un jeu de ficelle, les ramifications de sa pensée écologiste et philosophique. Résister au désastre est une excellente porte d’entrée pour découvrir la richesse intellectuelle de cette étrange école de pensée !

Rue des pâquerettes
Mehdi Charef, Ed hors d’atteinte / Pocket

De Medhi Charef, il y avait le magnifique et attendrissant Le thé au harem d’Archi Ahmed, publié en 1983, année de la Marche pour l’égalité et contre le racisme. A son tour, Rue des pâquerettes écrit une page indispensable de notre histoire coloniale et post-coloniale dans laquelle le romancier et cinéaste revient sur son arrivée en France en 1962. A travers une langue imagée et cinématographique, pleine de tendresse, il raconte la vie dans un baraquement de fortune, sans eau ni électricité. Le dénuement total, la boue et les rats. Le racisme ordinaire d’une France mais aussi sa rage d’enfant des bidonvilles et son avidité pour la lecture. Et toujours l’Algérie en ligne de fuite. Témoignage autobiographique poignant sur la première génération d’immigrés algériens, ce premier volet d’une trilogie est le récit inoubliable d’une enfance à l’ombre de l’exil. Une jeunesse assiégée de personnages inoubliables qui éclairent une vie quotidienne laborieuse.

Un bestiaire de bouquinistes
Aaron Cometbus, Ed Tahin Party

Issu de la culture des fanzines, Aaron Cometbus porte un regard tendre et drolissime sur le plus étrange des milieux, celui des bouquinistes new-yorkais. C’est Tahin Party, petit éditeur lyonnais, qui édite ce texte décalé comme on les aime, cette ethnographie punk pleine de tendresse et de poésie. Puisse ce petit bijou inspirer des vocations de bouquinistes sauvages !

Peuple
Deborah Cohen, Ed Anamosa

Qu’entendons-nous aujourd’hui par Peuple ? Comment fait-on Peuple, avec qui mais surtout contre qui ?
Deborah Cohen, dans son livre Peuple, tente de répondre à ces questions et de faire le point sur cette notion pour le moins ambiguë.
Récupéré par l’extrême-droite, utilisé par les post-marxistes comme substitut à la notion de classe, ce concept pourtant central de nos sociétés ne correspond à rien de précis. Le peuple est-il la figure sage de Rousseau et Hobbes, faisant vivre la république par le vote et la représentativité de ses élu·es ? Alors que penser en ce cas du mouvement des Gilets Jaunes ?
Le peuple est-il alors la foule anonyme, gouailleuse et romancée que l’on trouve dans les films de Marcel Carné ou de Pagnol ?
Peut-être serait-il temps d’abandonner ce terme normalisant et sclérosé, pour laisser s’exprimer les brèches et les différences, faire « commun », agir ensemble et se retrouver ?

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